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Gordien Ier et Gordien II

238
Gordien Ier et Gordien II
(Marcus Antonius Gordianus et
Antonius Gordianus Sempronianus)

On ne connaît pas grand-chose de ces deux Gordiens qui ne régnèrent guère que trois semaines au début de l’année 238.

Leur famille, vraisemblablement originaire de Cappadoce ou de Galatie (Turquie moderne), doit sans doute son nom d’Antonius à un aïeul qui vivait au premier siècle avant J.-C.. et qui aurait été affranchi ou élevé à la citoyenneté romaine par Marc Antoine, le rival d’Auguste et l’amant de Cléopâtre.
Bien que plusieurs biographes anciens aient commis cette grossière erreur, il faut naturellement bien se garder de confondre ce gentilice (Antonius) avec Antoninus, nom porté – ou usurpé – par de nombreux empereurs depuis Antonin le Pieux.

Le vieux Gordien, qui deviendra Gordien Ier, faisait partie du Sénat de Rome. Cependant, ce n’était pas un aigle, le Gordien…. et en tout cas ni le plus riche, ni le plus influent, ni le plus brillant des Pères conscrits. Pour preuve, il ne devint consul qu’à l’âge de soixante ans et exerça sans doute encore plusieurs gouvernorats provinciaux avant de recevoir, grâce à un tirage au sort, la charge de proconsul d’Afrique (Tunisie actuelle). À ce moment, Gordien Senior dépassait les quatre-vingts printemps, Une carrière bien lente et bien laborieuse…
gordien II

Son fils n’est guère mieux connu. Un certain Philostrate lui dédia (peut-être) son bouquin sur la Vie des Sophistes. Sinon à la part le fait qu’il se trouvait en Afrique aux côtés de son père lors des événements de l’année 238, c’est la bouteille à encre !

À cette époque (début de l’année 238), l’empereur Maximin le Thrace, un soudard, une brute épaisse, régnait depuis près de trois ans.
Pour ce souverain, pur produit des légions, les civils ne comptaient que pour des prunes, n’étaient que des vaches laitières qu’il fallait traire jusqu’à assèchement complet. Rien ne comptait sinon l’armée, la conduite et la guerre extérieure et le bien-être de ses copains les soldats. Alors, afin de financer ses ruineuses campagnes militaires contre les Barbares du Rhin et Danube, il mit littéralement l’empire à sac, rançonnant les familles les plus riches, saccageant les monuments pour récupérer les matériaux précieux. Il alla même jusqu’à piller les trésors des Temples, ce païen !

Si toutes les provinces commençaient à trouver le gouvernement de Maximin de plus en plus insupportable, ce fut en Afrique (du Nord) que la révolte éclata.

Un procurateur de la région de Carthage (Tunisie) se distinguait par son âpreté au gain, par sa rapacité et par sa dureté. Ce grippe-sou, qui voulait gagner les bonnes grâces de l’empereur Maximin, ne réussit qu’à cristalliser contre sa propre personne l’animosité de tous ses administrés. Le procurateur véreux dépassa les bornes quand il lui vint la malencontreuse idée d’attenter aux biens des riches colons romains.
Ces grands propriétaires fonciers armèrent alors leurs tenanciers et leurs esclaves, et, un jour que l’agent du fisc se trouvait à Thysdrus (aujourd’hui El Jem à 125 km de Tunis), ils le massacrèrent, lui et les quelques soldats qui l’accompagnaient.

Ce crime n’était que l’expression spontanée d’un ras-le-bol momentané. Ce n’est qu’après-coup que les conséquences probables de leur acte apparurent plus clairement aux émeutiers « On n’est pas dans la m… ! se dirent-ils. Maintenant qu’on a liquidé le valet de Maximin, comment allons-nous pouvoir échapper à l’inéluctable vengeance de l’empereur ? Cette grosse brute n’est pas spécialement réputée pour sa magnanimité ! »

La meilleure solution, c’était encore de diluer les responsabilités.
Ils s’en allèrent donc trouver le vieux sénateur Gordien qui, lui aussi, par hasard, séjournait à Thysdrus et lui offrirent le trône.

Le vieux bonhomme eut beau implorer, supplier, en se roulant par terre, qu’on éloigne de lui ce calice. Rien n’y fit. Il n’avait d’ailleurs pas le choix et les rebelles ne se firent pas faute de le lui mettre les points sur les i : « Si tu déclines notre offre, lui précisèrent-ils, tôt ou tard, nous mourrons sans doute…mais nous ne serons pas les seuls car, auparavant, nous t’aurons donné la mort ! ».
C’était le poignard ou la couronne ! Placé devant une telle alternative, Gordien accepta de revêtir la pourpre. Il associa aussitôt au pouvoir son fiston Gordien II, puis, à la tête de sa maigre bande de paysans armés, marcha sur Carthage où quelques troupes régulières se rallièrent à lui.

Afin d’informer Rome et les autres provinces de leur coup d’état et de se faire reconnaître, les deux Gordiens envoyèrent une multitude de lettres à tout ce qui comptait dans l’Empire. Tant était grande la haine envers Maximin le Thrace que leur autorité fut reconnue presque partout. Et les lettres de soumission d’affluer vers Carthage !

Cependant quand les réponses parvinrent à destination, les deux Gordiens étaient déjà morts et enterrés…
La réaction de l’armée, majoritairement favorable à Maximin, ne s’était pas fait attendre.
Le préfet Capelianus qui, avec de nombreuses légions, défendait la province de Numidie contre les invasions des Maures du Sahara, était, à la fois un ennemi intime des Gordiens et un fidèle d’entre les fidèles de Maximin. Il rassembla son armée et fondit sur Carthage.

Les Gordiens, n’avaient que de faibles troupes à opposer aux légions de Capelianus.
Gordien II, chargé par son père d’organiser la défense de la métropole africaine, tenta bien de résister du mieux qu’il put, mais il ne pouvait pas faire des miracles. Même si les volontaires carthaginois de Gordien étaient supérieurs en nombre, ils étaient peu habitués à combattre et mal armés. Les soldats de Capelianus, aguerris et disciplinés, n’en firent qu’une bouchée.

Gordien Junior périt dans l’engagement. Le vieux Gordien, lui, accablé de désespoir, se pendit quand il apprit l’issue funeste de la bataille et la mort de son fils unique.

Leur règne n’avait duré que trois semaines (début 238).