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Domitien
(Titus Flavius Domitianus)
Domitien, fils cadet de Vespasien, succéda à son frère Titus. (Voir Tableau généalogique).
C’était un sournois. Lors de la Guerre civile des années 69 -70, il avait déjà tenté de revêtir la pourpre au nez et à la barbe de son père Vespasien. Son coup d’état avait lamentablement échoué. Son oncle, le préfet de la Ville Flavius Sabinus, y avait d’ailleurs trouvé la mort, grillé vif dans l’incendie du Capitole.
domitien
Domitien est surtout connu pour son édit limitant la culture de la vigne dans les provinces de l’Empire. Édictant cette loi, qui préfigure de tristement célèbres directives européennes, il voulait protéger les viticulteurs italiens. Ce n’est que deux siècles plus tard que, grâce à l’empereur Probus (276 – 283), les Bourguignons et autres Girondins purent à nouveau goûter au fruit de la treille en toute légalité.
On dit encore que c’est Domitien qui exila à Pathmos le brave saint Jean, et aussi que ce cruel empereur se plaisait à arracher leurs pattes et leurs ailes à de pauvres mouches attrapées au vol … mais tout cela est très controversé.
Même si Domitien eut la faiblesse de payer un tribut aux Daces (peuplade de Dacie – Roumanie actuelle) pour qu’ils mettent fin à leurs incursions dans les provinces romaines voisines du Danube, il est néanmoins possible de dénicher, çà et là, certains aspects positifs à son règne. Par exemple, il embellit Rome, y faisant construire l’Odéon et un magnifique palais. Il édifia aussi un stade (le cirque Domitien) où se déroulaient de pacifiques concours d’athlètes, destinés, c’est du moins ce qu’il espérait, à remplacer les cruels jeux de l’amphithéâtre… Ce qui, du chef d’un souverain dont la cruauté est devenue proverbiale, étonne quelque peu. Quoi qu’il en soit, cet affadissement de la tradition ne compta pas pour rien dans la baisse de sa popularité
Cependant, la cause principale de la détestable réputation et de la chute de Domitien fut certainement son opposition radicale à l’aristocratie. Il ne faut pas perdre de vue que pour les aristocrates qui composaient la majorité du Sénat, ces Flaviens, issus de la bourgeoisie provinciale, n’étaient que des parvenus, des ruffians qui ne devaient leur élévation qu’au droit du glaive ! À ce mépris, Domitien répondit par l’autoritarisme forcené. Cette dureté provoqua des complots. Ces complots furent cruellement réprimés… Un enchaînement de violences, tragique, mais classique !
Finalement, une dernière conspiration, où trempa même son épouse Domitia, eut raison de celui qu’on surnomma « le Néron chauve » : Domitien fut assassiné par un de ses affranchis.
La tradition chrétienne, elle, présente Domitien comme le deuxième empereur qui persécuta l’Église. Ce n’est pas tout à fait exact.
Les historiens Dion Cassius et Suétone rapportent que Domitien fit rechercher les citoyens « qui vivaient comme des Juifs ».
À ce moment – nous ne sommes que moins de vingt ans après l’écrasement de la révolte juive de Menahem – il s’agissait sans doute plus de rechercher des activistes juifs (sympathisants zélotes), infiltrés au plus haut niveau de l’administration ou de la magistrature que de « persécuter une religion », une notion par ailleurs fort étrangère au droit romain.
L’historien antique Dion Cassius rapporte qu’au nombre des personnes appréhendées se trouvait le consul Flavius Clemens, qui porte le même nom que le cinquième (ou troisième) pape. C’était aussi le propre cousin de Domitien, le fils de ce préfet de Rome dont j’ai parlé plus haut. (voir Tableau généalogique).
Ce Flavius Clemens, qui fut probablement exécuté comme activiste juif, donc pour haute trahison, est considéré par l’Église catholique comme un martyr de la Foi… Ainsi d’ailleurs son épouse Domitilla, propre sœur de Domitien qui fut exilée à Pandateria et donna son nom à une célèbre catacombe… Et comme leurs enfants : deux fils et une fille, également nommée Domitilla.
La Sainte Famille chez les Romains !
Il ne faut non plus pas perdre de vue que ce Flavius Clemens était le plus proche parent de Domitien. Ses enfants étaient même, aux dires de Suétone, les successeurs désignés du « Néron chauve ». Plus de deux siècles avant Constantin, un Chrétien aurait donc pu s’asseoir sur le trône des Césars ! (voir Tableau généalogique).
Cette parenté entre l’empereur et les soi-disant martyrs montre aussi que Domitien visait sans doute moins à poursuivre les prosélytes juifs (ou judéo-chrétiens, ou chrétiens judaïques) qu’à éliminer des prétendants à sa succession, conspirateurs ou prétendus tels. Les « mœurs judaïques » n’auraient servi que de prétexte à ce souverain pathologiquement méfiant qu’était Domitien.
La prétendue « persécution de Domitien » ne fut donc probablement que la répression d’un complot d’ordre politique, contre les activistes juifs (Zélotes), ou un règlement de compte familial. Les motifs religieux furent secondaires, voire inexistants.